Prendre le bus, c’est une activité communément réalisée par des millions de personnes chaque jour. Chez PDLV, on a eu envie d’aller un petit peu plus loin : prendre le volant du bus. Pour cet essai hors du commun, on vous propose de prendre le bus comme vous ne l’avez jamais pris. À notre disposition, un vaillant Heuliez GX 317, écoulé à plus de 2 000 exemplaires dans l’hexagone, que vous avez peut-être même déjà emprunté. Vous allez le voir, c’est un essai inoubliable qui s’annonce pour nous mais aussi quelques frayeurs. Cet essai est également disponible en vidéo, un petit peu plus bas. Notre modèle d’essai date de 1995, a été réformé en 2020 et totalise plus de 870 000 kilomètres. Et vous savez quoi ? Il est en pleine santé !
Fiche technique Heuliez GX 317
Dimensions | 11,9 x 2,50 x 2,91 mètres |
Poids | 11 400 kg |
Transmission | Propulsion |
Boîte de vitesses | Automatique ZF, 4 rapports |
Commercialisation | 1994 à 1996 (Euro 1) |
Moteur | 9.8 litres 6-cyl. en ligne turbo Diesel |
Puissance | 253 chevaux à 2 050 tr/m |
Couple | 1 050 Nm à 1 080 tr/m |
0 à 100 km/h | Non |
Vitesse maximale | 80 km/h (limitée) |
Puissance fiscale | 26 CV |
Consommation mixte | ~ 35 L/100 km |
Cote actuelle | Fortement variable suivant état |
Essai vidéo du bus Heuliez GX 317
Le bus, si commun et si méconnu
Par rapport aux transports aux communs, il y a plusieurs écoles. Il y a ceux qui les subissent et ceux qui les apprécient. Après les avoir longtemps subis, je m’intéresse de plus en plus à tout ce qui roule et les bus en font assurément partie. Un heureux concours de circonstances nous a permis de prendre les commandes, durant une journée, d’un Heuliez GX 317 de 1995.
C’est un modèle de bus largement diffusé dans l’hexagone mais qui a aujourd’hui quasiment disparu des réseaux, en raison de son âge. Avant de nous intéresser plus particulièrement à l’essai de ce bus, je vais vous parler un petit peu plus des bus. Déjà, il ne faut pas confondre les bus et les cars, car ce sont bien deux véhicules distincts. Le bus effectue des services urbains et dispose d’un plancher plat (en général) où l’on peut voyager assis ou debout. Le car est surélevé, assure des lignes périurbaines ou régionales et dispose de rangées de sièges.



Il existe par ailleurs plusieurs formats et types de bus. Pour s’adapter aux contraintes des réseaux et des lignes, les constructeurs de bus, dont les plus connus sont Renault, Irisbus, Iveco, Heuliez, MAN ou encore Mercedes, ont décliné leurs modèles avec plusieurs longueurs différentes. Chacune à son petit nom et un nombre de portes bien particulier pour fluidifier la circulation à bord. Si la largeur de 2,50 mètres est généralisée, la montée par la porte avant l’est aussi, ce qui permet, pour le conducteur, de contrôler plus efficacement la validation des titres de transport. À une époque pas si lointaine (mais un peu quand même), il y avait un conducteur et un receveur dans chaque bus.
Illustration | Type | Essieux | Longueur moyenne | Capacité moyenne |
![]() | Midibus | 2 | 9 ou 10 mètres | 65 passagers |
![]() | Standard | 2 ou 3 | 12 à 15 mètres | 100 passagers |
![]() | Articulé | 3 ou 4 | 17 à 20 mètres | 180 passagers |
![]() | Bi-articulé | 4 à 5 | 24 à 30 mètres | 230 passagers |
Heuliez et les autobus
Remplaçant progressivement les omnibus trainés par des chevaux, les bus à moteur sont apparus dès le début du XXème siècle. Il n’a guère fallu de temps pour que les premiers réseaux voient le jour, exploitant des lignes desservies à des horaires réguliers. Le matériel roulant s’est progressivement standardisé, au fil des besoins et des possibilités. De nombreuses générations de bus se sont succédé, d’abord avec des moteurs à essence, puis diesel. L’avènement du GNV a marqué un tournant au début des années 2000 avant que l’électrification ne commence à arriver. Parmi les constructeurs historiques, le carrossier Heuliez figure en bonne place, dès 1932. L’usine, implantée à Rorthais, dans les Deux-Sèvres, ne manquera jamais ni d’idées ni d’ingéniosité pour séduire les exploitants de réseaux bus.
Symbole du savoir-faire à la française, Heuliez a collaboré avec Mercedes avant de se tourner vers Renault pour produire ses premiers modèles de grande série, dès le début des années ’80. Parmi la lignée des bus standards Heuliez, il y avait le GX 107. Un bus rustique caractérisé par une ligne de caisse très haute et un pare-brise qui descend très bas. Ce modèle emblématique cède sa place au GX 317 dès le milieu des années ’90. Nous essayons justement un bus de ce type, dans sa première évolution, répondant à la norme de pollution Euro 1. Le design s’est modernisé avec des formes plus souples tout en partageant la base technique et quelques éléments de carrosserie avec le célèbre Renault Agora. À cette époque, les réseaux de bus sont en plein développement et cherchent à renouveler leur parc, souvent vieillissant.



Heuliez, avec son GX 317 marque clairement des points puisqu’il s’agit d’un bus alors très moderne de conception qui a des arguments de choix. Déjà, le design marque un vrai renouveau, avec la possibilité d’avoir trois portes. Les deux premières donnent accès à un plancher plat, idéal pour l’accès aux personnes à mobilité réduite. Divers équipements viennent rendre les voyages plus agréables, aussi bien pour les conducteurs que les passagers. C’est par exemple le cas de la climatisation, optionnelle dès 1995. Pas mal, hein ? Partons à la découverte de cet Heuliez GX 317 qui réserve bien des surprises !
La naissance de la gamme Access’Bus
Appartenant à la gamme Access’Bus, l’Heuliez GX 317 est en réalité l’un des quatre types de bus alors proposé dès le milieu des années ’90, par le carrossier. La volonté de la marque est de s’inscrire pleinement dans un renouveau avec plus de confort et une meilleure réponse aux contraintes du moment. Ainsi, on voit l’apparition de la norme Euro 1, qui est aujourd’hui obsolète en matière de pollution, le plancher plat et des moteurs plus efficients et moins énergivores. Ce sont donc des bus modernes qui, avec leurs différents formats, parviennent à cibler les attentes des exploitants. Points forts : de nombreuses personnalisations sont possibles, avec des formules clés en main très intéressantes.
![]() | Heuliez GX 117 Midibus 2 portes 9/10 mètres Moteurs Renault ou Iveco 1998 à 2006 |
![]() | Heuliez GX 217 Standard 2 ou 3 portes 12 mètres Moteurs Volvo 1996 à 2001 |
![]() | Heuliez GX 317 Standard 2 ou 3 portes 12 mètres Moteurs Renault ou Iveco 1994 à 2005 |
![]() | Heuliez GX 417 Articulé 3 ou 4 portes 18 mètres Moteurs Volvo 1995 à 2000 |
Heuliez GX 317 : un design fonctionnel mais intelligent
Trop souvent résumé à sa fonctionnalité, le bus est pourtant dessiné soigneusement par des designers. Commençons par l’avant. Déjà, on note un épais bouclier avant, composé en trois parties dont les ajustements sont à des années lumières des standards actuels. Mais c’est en fait très intelligent : en cas de choc urbain, seule une des parties peut être remplacée. Le tout est simplement vissé pour faciliter la maintenance. C’est là que l’on comprend que par rapport à une voiture, la notion de facilité d’entretien rentre pleinement en compte. Notre exemplaire ne dispose pas des phares anti-brouillards, alors optionnels. Les optiques ont une forme simple, décomposée en deux parties. Sur la partie intérieure, de simples phares halogènes. Sur l’extérieur, les clignotants. Là encore, tout est démontable très facilement. Contrairement à un Renault Modus, il n’est pas ici question de démonter le pare-choc pour remplacer une ampoule !

Le pare-brise est clairement immense tout en étant incurvé sur les côtés. Placé au sein d’un épais joint en caoutchouc, il force l’admiration et fait redouter l’impact. J’ai une pensée pour les centres de maintenance qui doivent parfois remplacer cette pièce large de plus de 2 mètres. Les essuie-glaces, massifs, parviennent à balayer une surface très importante. Quant aux rétroviseurs, ils sont très basiques dans leur dessin et sont asymétriques. Celui-ci du côté droit est déporté afin d’offrir une vue dégagée jusqu’à l’arrière du bus, 12 mètres plus loin. Sur le capot, le logo Heuliez est appliqué sobrement. La livrée de ce bus intègre un masque noir qui descend assez bas et prolonge visuellement le pare-brise. En haut, la girouette, permettant d’afficher à la fois la ligne et la destination du bus. En somme, un dessin avant plutôt réussi, sans fantaisie, mais qui vieillit bien.



Comme me l’a fait remarquer Simon, il n’est pas aisé, pour un regard non exercé, de différencier au premier coup d’œil un bus de 10 ans et un autre plus récent. L’Heuliez GX 317 a un design assez intemporel dont on ne se lasse pas. Alors bien sûr, pas de phares à LED, pas de girouette colorée ni même de vitres teintées… Mais cette simplicité est séduisante. Le dessin de la livrée d’origine joue beaucoup sur la perception du design d’un bus. Celle-ci est relativement sobre et ne dénote pas, selon moi. Néanmoins, cet essai a été réalisé après la réforme du véhicule et son rachat par un particulier.
Un profil de bus comme on en voit tous les jours !
Contrairement à une voiture, un bus, c’est deux profils différents. Les portes se trouvent toujours d’un seul côté, celui du trottoir, afin de faciliter la descente. Le côté gauche de notre Heuliez GX 317 est donc plutôt épuré. Un profil agrémenté de sept fenêtres qui habillent le bus d’un bout à l’autre. Forcément, c’est un design très industriel, qui a pour vocation à réduire les coûts de maintenance. On note un très fort porte-à-faux, aussi bien à l’avant qu’à l’arrière afin de faciliter les manœuvres. Le long des bas des caisse, différentes ouvertures permettent d’accéder à des composants mécaniques. Sous le conducteur, c’est les deux batteries par exemple. On notera un encart publicitaire assez important qui permet aux réseaux de bus de faire rentrer de l’argent autrement que par la vente de tickets.

De l’autre côté, notre bus dispose de trois portes à double vantaux, réparties à l’avant, au milieu et à l’arrière. Une girouette secondaire prend place sur la partie supérieure afin d’indiquer la destination aux passagers qui montent. Les roues sont habillées d’enjoliveurs ; une coquetterie devenue rare de nos jours. Par ailleurs, ces roues en aluminium ont une dimension de 22 pouces. On perçoit par ailleurs une rampe “PMR” au niveau de la porte secondaire et une trappe à carburant recouverte d’un épais plastique qui court jusqu’au sol pour limiter les traces de gasoil. C’est donc un profil très classique, qui s’apparente à celui de beaucoup de bus. L’exploitant original a opté pour des pare-chocs et bas de caisse gris qui contrastent assez bien.
Quant à l’arrière, il dispose d’un large capot moteur qui coulisse vers le haut. On retrouve des optiques très basiques et une lunette arrière incurvée. Un dispositif élégant, qui apporte de la luminosité et qui trahit la parenté avec le Renault Agora. Les ajustements de carrosserie sont clairement mauvais, avec des jours importants. Mais n’oublions pas que ce bus a dépassé les 850 000 kilomètres et que bon nombre des éléments de carrosserie (en matériaux composite) ont déjà été remplacés. Malgré tout, ce bus vieillit bien dans sa ligne et demeure agréable à regarder.
Des contraintes de conception
Heuliez étant un carrossier, il a donc été nécessaire de s’adapter à une base existante. En l’occurrence ici, c’est celle du Renault Agora. Long de 11,99 mètres, ce bus standard dispose d’un plancher plat jusqu’à la porte intermédiaire. Au-delà, une pente permet d’accéder jusqu’à l’arrière. Cela s’explique par des contraintes de conception. Pour favoriser l’adhérence, la puissance passe sur les roues arrière, qui sont jumelées. Le moteur étant à l’arrière, un arbre de transmission occupe les soubassements jusqu’à l’essieu. Malgré tout, le plancher plat sur la moitié du bus est une véritable prouesse, qui profite principalement aux personnes à mobilité réduite. Mais pas seulement, pour les personnes âgées, le gain de temps est important. Moins de temps aux arrêts, c’est de meilleurs rendements.



Les immenses porte-à-faux effraient de prime abord. Pourtant, ils sont indispensables pour réduire le rayon de braquage et faciliter les manœuvres, surtout en ville où l’avant est parfois déporté sur les trottoirs. Les grands rétroviseurs, asymétriques, offrent d’ailleurs une bonne rétrovision, jusqu’à l’essieu arrière. Le conducteur dispose d’une position de conduite surélevée, qui domine la route et qui permet aussi d’accueillir un énorme arbre directionnel. D’une manière générale, cette architecture est commune à la majorité des bus présents sur le marché.
Aussi, il était nécessaire de respecter des contraintes de poids. C’est pour cette raison que la carrosserie est en matériaux composite. Les pièces sont assez cassantes mais peuvent être remplacées partiellement grâce à de nombreuses découpes. De même, les épais pneus (de 275 millimètres), disposent d’un flanc très haut qui permet d’absorber les frottements de trottoir. Tout a été pensé pour faciliter la maintenance, aussi bien à l’extérieur qu’à l’intérieur. À bord justement, des centaines de câbles sont disséminés dans les parties hautes, permettant d’atteindre les différents composants du bus. C’est très impressionnant mais pas illogique puisque le poste de conduite et le moteur sont éloignés d’une bonne dizaine de mètres !
À bord de cet Heuliez GX 317 Euro 1 de 1995
À l’instar de nombreux réseaux, celui dont provenait ce bus a choisi la montée par la porte avant. Cela permet au conducteur de contrôler la validation des titres de transport. Les passagers sont ensuite invités à avancer vers l’arrière afin de se répartir sur toute la longueur. Au centre, un couloir permet d’évoluer vers les premiers sièges avant. Ceux-là sont placés sur les passages de roue : c’est un grand classique pour les bus, même ceux d’aujourd’hui !
On accède ensuite, sur la gauche, à un espace destiné aux personnes à mobilité réduite. Ces dernières peuvent se mettre en appui et disposent d’une barre de maintien déployable. De l’autre côté, deux sièges en vis-à-vis. Tous les sièges sont basés sur le même moule avec une structure en métal peinte en verte. Dessus, un revêtement à motif anti-lacération. C’est assez spartiate et dur, mais convenable pour de courts trajets. Le plateau central est donc surbaissé puis en allant vers l’arrière, on découvre différents sièges, répartis par deux, permettant d’accueillir quatre personnes de front, avec toujours un accès central.


L’espace aux jambes est particulièrement inégal, en fonction des différentes implantations de sièges. Comme à l’avant, certains sièges se retrouvent positionnés sur les passages de roue arrière. Différentes barres de maintien sont disposées tout du long afin de permettre aux passagers qui n’ont pas la chance d’avoir une place assise, de pouvoir se tenir. Toutefois, ces barres ne participent pas à la rigidité de la caisse. On trouve aussi des boutons dits “Self Service”, qui permettent d’indiquer au conducteur, notre volonté de descendre au prochain arrêt. Tout cela, vous le connaissez certainement mais aviez-vous déjà pris le temps de vous intéresser ?





Les portes disposent d’une commande pneumatique, permettant de les ouvrir. Tout se commande depuis le poste de conduite. C’est le conducteur qui autorise les passagers à ouvrir les portes lors d’un arrêt. Par sécurité, il existe une commande de déverrouillage manuel qui peut être activée en cas de problème. À bord, l’ambiance est plutôt agréable, c’est très lumineux et propre dans l’ensemble. Les matériaux utilisés ont parfaitement encaissé le poids des années. Preuve en est que cette rusticité n’est pas vide de sens ! On trouve aussi des publicités d’époque, qui étaient renouvelées régulièrement lorsque ce bus était en service. D’ailleurs, combien de personnes ont côtoyé cet intérieur de bus ? Probablement plusieurs dizaines de milliers ! Par ailleurs, les bus subissent généralement une remise à neuf intérieure à mi-carrière.
Le poste de conduite
Prenons maintenant la meilleure place : celle du conducteur. Pour y accéder, nous disposons d’une porte qui permet d’isoler le poste de conduite. Celle-ci s’ouvre assez facilement grâce à une gâchette. On monte alors deux petites marches avant de prendre place dans le fauteuil. Là, on remarque tout de suite une différence de traitement : le conducteur dispose d’un siège moelleux et rembourré. Il y a même un petit accoudoir mais pas d’appuie-tête. On domine la route et on dispose d’une excellente visibilité, aussi bien sur l’extérieur qu’à l’intérieur. Différents miroirs permettent de voir l’ensemble des passagers. De prime abord, c’est un tableau de bord plutôt complexe, avec une multitude de commandes. L’âge de ce bus, qui date de 1995, se ressent clairement avec des boutons à l’ancienne et des formes très strictes. On dispose même d’une fenêtre coulissante sur notre gauche. Sans être luxueux, c’est un habitacle fonctionnel.

On repère assez vite l’énorme volant, siglé Renault. L’aspect industriel est indéniable puisque la fonction prime clairement sur l’esthétique. Sur la partie droite, on a le SAE, le service d’aide à l’exploitation. Chaque réseau dispose de son propre terminal qui permet d’afficher la destination et d’apporter tout l’écosystème propre à chaque réseau.
Celui-ci est simplement “imbriqué” sur un espace dédié puis vissé. On trouve aussi les commandes de porte et celles de la boîte de vitesses ZF à 4 rapports. Dans ces intérieurs “youngtimers”, j’apprécie ces boutons et connectiques qui offrent une “consistance” au toucher. À l’heure du tout-numérique, le poste de conduite de cet Heuliez GX 317 est très satisfaisant. Sur la porte, on trouve un compartiment pour les pièces et les tickets car outre la conduite, un chauffeur de bus doit aussi assurer la vente de tickets. À ce moment-là, je n’ai qu’une hâte, c’est de passer au volant et surtout, de conduite sur le parcours que nous avons privatisé pour l’occasion.

Arsène : portrait d’un propriétaire de bus un peu fou
Les transports en commun, certains les subissent, d’autres les adorent. Arsène fait assurément partie de cette deuxième catégorie. Manceau d’origine, il connaît à la perfection chaque bus ayant circulé sur le plus grand réseau sarthois. Cette passion envahissante l’a poussé à accomplir un rêve d’enfant : acheter son propre bus. C’est désormais chose accomplie avec cet Heuliez GX 317, acquis en 2020, quelques mois après sa réfome. Un feeling en apercevant ce bus, qui s’est soldé sur un achat d’impulsion qui n’a rien de raisonnable car pour accueillir un bus de 12 mètres, il faut de la place !
Son bus favori, c’est le Renault R 312. Son Heuliez GX 317 Euro 1 de 1995 reprend cette même base et accueille également un moteur d’origine Renault : le MIDR 06.20.45. Si la base est saine, malgré plus de 870 000 kilomètres au compteur, Arsène rénove petit à petit ce bus, avec passion et dévouement. Chaque bouton retrouve son aspect d’origine, tout comme la sellerie et les multiples éléments qui ont pu s’altérer au fil des années. Mécanicien de formation, il redonne ses lettres de noblesse au gros 6-cylindres Diesel de 10 litres… Croyez-moi, c’est une mécanique qui tourne rond !
Quand on évoque les projets futurs, Arsène n’en manque clairement pas et je peux vous assurer que le programme à venir est particulièrement alléchant et ferait rêver bon nombre de passionnés de bus ! En attendant, la restauration continue, tout comme la collecte de pièces. C’est aussi l’occasion pour ce jeune passionné d’effectuer des sorties et de concilier avec son autre passion : la photographie.
Un moteur 6-cylindres de 10 litres !
Ce bus mesure trois fois la longueur d’une voiture citadine… Alors forcément, tout est démesuré. Les jantes sont en 22 pouces, la hauteur approche des 3 mètres et rétroviseurs non compris, la largeur atteint les 2,50 mètres. Avec une masse de plus de 11 tonnes, notre vaillant Heuliez GX 317 se doit d’être généreusement motorisé. En toute logique, ce bus dispose d’un moteur Diesel. Bien que je n’aime pas ce carburant, il demeure tout à fait approprié pour déplacer des masses importantes sur des périodes suffisamment longues. Sur un bus, le moteur se trouve généralement à l’arrière, en position transversal. Sur ce modèle, c’est le cas. À l’arrière, un immense capot peut se relever afin d’accéder à la mécanique. Et là, on est clairement impressionné. L’immense moteur est enveloppé autour d’un grand nombre de composants. Là encore, tout est immense, c’est juste bluffant !

Pour autant, même si tout est très gros, l’ensemble demeure accessible et bien conçu. L’entretien des bus doit être facile et sans difficulté. La preuve, après plus de 870 000 kilomètres au compteur, ce bus roule toujours. La clé, c’est bien sûr un entretien régulier, comme une voiture. Parfois, il peut y avoir des pannes immobilisantes, comme un joint de culasse à remplacer, qui peut engendrer une réforme si le bus est déjà amorti. Certains réseaux de bus sont plus rigoureux que d’autres sur l’entretien de leurs bus. Dans le cas du “003” de notre ami Arsène, le réseau en question était particulièrement vigilant, d’où le bon état de ce bus, après 25 ans de service !
Renault MIDR 06.20.45 pour les intimes
Toujours sous le capot moteur, on découvre l’imposant 6-cylindres turbo Diesel, que l’on peut également apercevoir depuis l’intérieur, en retirant un imposant cache. Avec sa cylindrée de 9.8 litres, ce moteur d’origine Renault fournit 253 chevaux et près de 1 050 Nm de couple sur les roues arrière, qui sont jumelées. Les performances sont assez faibles mais de toutes manières, ce n’est pas la vocation de ce véhicule dans lequel on peut voyager debout ! Malgré tout, les reprises sont honnêtes. Par le passé, certains bus ont existé avec une boîte de vitesses manuelle et cela devait être l’enfer en ville. Sur ce modèle, on découvre une boîte robotisée ZF à quatre rapports. Les passages de rapport, qui peuvent également être effectués manuellement, manquent clairement de fluidité mais cela reste agréable à l’utilisation, avec des à-coups limités. Comme pour tout, c’est une question d’habitude et de feeling.



Ensuite, il y a tout un tas de composants, plus ou moins spécifiques aux bus, qui viennent s’ajouter. Outre le frein de parking (l’équivalent de notre frein à main), il y a aussi le frein d’exploitation. Celui-ci permet de bloquer les roues le temps d’un arrêt. La suspension pneumatique garantit une grande souplesse afin d’offrir le meilleur confort possible aux passagers, tout en limitant la transcription à bord, des irrégularités de la route. La direction est également fascinante car les roues étant derrière le conducteur, le volant est relié à différentes biellettes qui viennent agir sur les roues ensuite.
Au volant du bus : le feeling
Mettons-nous maintenant à la meilleure place : celle derrière le volant. Outre la sensation de dominer la route, on se sent comme au volant d’un paquebot. Main sur le volant, j’appuie sur le bouton Start par une brève pression, après avoir inséré la clé. 11 mètres plus loin, j’entends le moteur se mettre en éveil. Quelques vibrations dans le tableau de bord rappellent l’âge du bus. Une ambiance délicieusement vintage qui est très agréable. Pied sur le frein, j’enlève le frein à main, enfonce le bouton “D” qui commande la boîte. Le joli monstre s’élance alors, très progressivement La pédale d’accélérateur, il faut clairement l’enfoncer pour mouvoir les 11,4 tonnes de cet Heuliez GX 317. La conduite ne présente aucune difficulté, le fait que nous soyons en pleine campagne, sur une zone privatisée, renforce peut-être ce sentiment. Dans l’épais rétroviseur, je prends rapidement conscience de la taille de l’engin !
Les accélérations ne sont pas décoiffantes mais elles suffisent amplement pour un service commercial, majoritairement urbain. La direction est assez floue et sans surprise, elle nécessite de revoir toutes ses habitudes. Les portes-à-faux étant énormes, il ne faut pas hésiter à mettre le nez du bus sur le trottoir ou dans le fossé afin que les roues prennent correctement le virage.
C’est perturbant et pourtant tout à fait logique. Face à moi, différents compteurs qui indiquent la vitesse, le niveau de gasoil, la température d’huile moteur, la température d’huile de boîte… On ne sait plus vraiment où regarder mais l’ensemble a le mérite d’être complet. Sur ma gauche, toute une panoplie de boutons. Certains sont par ailleurs remplacés d’un simple cache, car un bus a rarement toutes les options disponibles au catalogue. Le freinage demande un fort temps d’adaptation car la course de la pédale est énorme. On entend alors les mâchoires presser les disques de frein avant.
Attention à ne rien oublier !

Avec sa largeur totale de 2,50 mètres, le bus donne l’illusion que les routes sont toutes petites ! J’ai clairement un profond respect pour nos amis chauffeurs de bus qui évoluent dans un milieu urbain. La position de conduite surélevée rassure tandis que les rétroviseurs extérieurs assurent parfaitement leur rôle ; la rétrovision est vraiment très bonne.
Sur ma droite, il y a le SAE – le service d’aide à l’exploitation – qui permet de gérer les destinations, d’informer le centre de régulation en cas de problème ou plus simplement, de communiquer avec d’autres personnes du réseau. Au-dessus de ma tête, la programmation de la girouette, pour afficher la bonne destination et la radio. On est clairement sur une ambiance façon aviation, avec des commandes disséminées un petit peu partout. Ce qui est aussi amusant, c’est l’univers un petit peu feutré du conducteur, isolé des passagers par une paroi arrière et une porte d’accès. Petit confort : un accoudoir rétractable permet de poser son coude. En plus, il est rembourré.



Que dire d’autre ? Ce bus offre un plaisir de conduite comme j’en ai rarement connu. Bien sûr, on doit clairement s’y habituer au bout de quelques jours mais je ne vous cache pas avoir clairement apprécié l’expérience. On ressent bien la mécanique dans les pédales et la direction. Je ne sais pas si un bus moderne offrirait un tel feeling. Dans les virages, le maniement de l’immense volant ne présente pas de difficulté bien qu’il faille anticiper, ralentir la cadence et prendre le tournant le plus proprement possible pour éviter les chutes de passager. À la ré-accélération, le couple aide énormément à repartir mais n’espérez pas drifter ! Les quatre roues arrière offrent un excellent grip. L’amortissement est également très bon, avec une très grande souplesse et un ralentisseur bien dosé. La conduite est d’une étonnante souplesse…
Alors bien sûr, il ne faut pas être pressé mais la conduite de ce Heuliez GX 317 est très apaisante, tout en permettant de bien ressentir la mécanique. Et même si c’est un Diesel, je dois reconnaître que j’ai adoré ! Le turbo charge continuellement pour offrir davantage de ressources lors des démarrages. Une fois lancé, le bus se conduit sans grande difficulté dès lors qu’il n’y a pas d’obstacles sur la route.

Les vocalises du moteur sont agréables. Dès lors qu’ils ont plus de 6-cylindres, les moteurs Diesel n’ont pas ces claquements dégueulasses que l’on peut trouver sur les voitures. C’est une sonorité assez caractéristique des bus, avec des montées en régime bien perceptibles et le fameux “pfiouuu” à chaque relâché de la pédale. Par ailleurs, notre exemplaire est la toute première évolution, qui répond à la norme Euro 1. Dès 1996, ce sont les Heuliez GX 317 Euro 2 qui sont entrés en action, puis les Euro 3 à partir de 2001. Par ailleurs, Heuliez Bus proposait une version au GNV (gaz naturel de ville), identifiable à ses réservoirs sur le toit.
Oh ! Il faut s’arrêter !
Conducteur-receveur, c’est souvent l’intitulé du poste en question. En effet, outre la conduite, les conducteurs de bus doivent également gérer les clients qui montent et ceux qui descendent. Il faut donc régulièrement ouvrir les portes. Pour cela, des boutons rouges permettent d’ouvrir indépendamment chaque porte. La plupart des réseaux ont opté pour le “Self-service” qui permet aux voyageurs de demander l’arrêt via un bouton dédié.

L’information est alors affichée sur le tableau de bord afin d’indiquer qu’il est nécessaire de marquer le prochain point d’arrêt. Lors de l’arrêt, après avoir mis le frein d’exploitation, le conducteur, peut permettre aux passagers d’ouvrir les portes arrière manuellement. Quant à ceux qui montent, il faut contrôler la validation de leur titre de transport et parfois, assurer la vente du titre de transport. Les missions sont donc bien plus complètes qu’on ne le pense. Mais toute cette partie, je ne l’ai bien sûr pas assurée.
Parmi nos différents essais, celui de ce bus est assurément le plus atypique. C’est particulièrement déstabilisant tout en étant fascinant à la fois. Bien sûr, il est impossible de développer l’aspect conduite comme pour une voiture car cela est totalement différent. Mais au volant du bus, on comprend mieux les difficultés auxquelles sont confrontés les conducteurs… Et encore, nous n’avons pas eu d’arrêts à desservir ni à nous engager à un “Céder le passage”. Bref, un jour, j’aurais un bus.
Acheter un bus, comment ça se passe ?

Si l’envie d’acheter un bus vous prend, il y a plusieurs choix. Avant tout, il est nécessaire d’être titulaire du permis D, qui vous autorise à conduire un véhicule de transport de plus de 8 mètres, pouvant accueillir plus de 9 personnes. Vous auriez alors le choix entre des bus neufs ou d’occasions. Ce paramètre détermine totalement le canal d’achat. Nous allons donc voir très brièvement en quoi consistent ces deux canaux.
- Acheter un bus neuf : les réseaux de bus achètent généralement leurs bus par le biais d’un appel d’offres, dirigé par le prestataire. Il s’agit alors d’achats groupés, dont l’équipement est négocié, avec éventuellement des options sur l’ensemble du lot. Certains constructeurs proposent d’appliquer eux-mêmes la sellerie, les équipements spécifiques et même de configurer tout l’intérieur, et notamment la couleur des assises. Si un seul bus vous intéresse, vous pouvez directement entrer en contact avec le fabricant qui vous intéresse. Un bus neuf, standard, coûte généralement autour des 200 000 €. Cette somme peut être considérablement alourdie pour le GNV, l’hybridation ou l’électrification ;
- Acheter un bus d’occasion : plusieurs sites internet spécialisés, comme Agorastore, vous permettent d’acheter des bus d’occasion aux enchères. De temps à autre, on en trouve aussi sur le site des ventes du Domaine. Parfois, des sites de petites annonces bien connus proposent aussi des bus d’occasion ! Certains réseaux choisissent de retirer la livrée d’origine, d’autres la conservent comme c’est le cas ici. Nous avons toutefois camouflé les logos puisque ce bus n’appartient plus à son réseau historique.

Et l’entretien ?
Ci-dessous, vous trouverez un court tableau représentant des coûts moyens, que nous avons pu observer, quant à l’entretien d’un bus. Ces données peuvent varier en fonction de nombreux paramètres et sont purement indicatives :
Opération | Coût TTC moyen |
Assurance tous risques à l’année | ~ 500 € |
Pneu (une unité), hors montage | 360 € |
Batterie (deux unités) | 250 € |
Vidange (35 litres d’huile) | 450 € |
Kit embrayage (hors montage) | 1 150 € |
Équipements de série
Carrosserie 2 ou 3 portes | Pare-chocs peints ton carrosserie |
Sellerie au choix du client | Suspension pneumatique |
Volant et tableau de bord réglables | Carrosserie peinture en blanc |
Self-service (demande d’arrêt) | Girouette grand format et dégivrante |
SAE (service d’aide à l’exploitation) | Revêtement de sol haute résistance |
Principales options
Rampe PMR deuxième porte | Climatisation |
Climatisation | Vitrage athermique |
Phares antibrouillards avant | Girouette latérale droite |
Mise en place de la livrée réseau | Rétroviseurs dégivrants |
Chauffage autonome | Sièges passagers rembourrés |

Le mot de la fin
Essayer un bus, c’était un rêve depuis longtemps. Cet essai inédit nous a permis de mieux prendre conscience de la difficulté du métier, des enjeux et des responsabilités qui nous incombent au volant d’un véhicule de plus de 11 tonnes. La très grande souplesse de conduite d’un bus procure un plaisir certain… Dès lors que l’on n’évolue pas en ville. Si cet essai a répondu à bon nombre de nos interrogations, j’espère qu’il vous aura également permis de regarder d’un œil nouveau, le prochain bus que vous emprunterez. Un tel essai nous a demandé une grande logistique et plusieurs mois de travail. S’il vous a plu et que vous souhaitiez que l’on poursuivre des essais décalés de temps à autre, n’hésitez pas à nous le faire savoir.
Enfin, il m’est impossible de terminer cet article sans adresser des remerciements à toutes les personnes en entreprises qui ont collaboré, de près ou de loin, à la tenue du projet et à son bon déroulement :
- Simon Lemaître : pour ses prises de vue d’exception et les photos qui illustrent cet article ;
- Arsène Guillois : pour la mise à disposition de ce somptueux bus ;
- Lorenzo Dalibard : pour ses plans de vue et la sécurisation de la zone ;
- La mairie de Volnay (72) : pour la privatisation de la route et la logistique impeccable ;
- La SERE de Mayenne (53) : pour la mise à disposition du bureau ;
- Le réseau de bus TUL de Laval (53) : pour leur accueil et leur gentillesse ;
- Superflame : pour la voix d’introduction de la vidéo.

Envie d’en savoir plus ?
Venez ! Je vous embarque au dépôt de bus des TUL de Laval, pour découvrir les coulisses : plein de carburant, entretien, nettoyage, gestion de parc…